Nous, les humains, vivons essentiellement dans deux mondes : celui qui nous est donné immédiatement par les sens, et le monde culturel, spirituel, qui nous est transmis via les médias. Une consommation facile, une diffusion omniprésente, enfin et surtout la pression sociale nous retiennent de plus en plus devant des écrans qui nous inondent d’un flot d’informations et d’images. Privé du présent immédiat, de plus en plus connecté au monde via les médias et les outils techniques, le Narcisse moderne, captivé, s’attarde devant une surface où il se reflète et qui s’agrandit constamment. Il n’est pas vraiment seul, mais son vis-à-vis n’est trop souvent que l’écho désincarné de lui-même, non un autre vivant.
Nous perdons-nous comme sujets dans la mesure même où nous perdons le monde et les autres, et si oui, à quoi aspirons-nous ? Il serait erroné d’interpréter des phénomènes simultanés en termes de causalité : la fuite dans des espaces virtuels fait partie d’un long processus de désincarnation et de désensibilisation de notre existence, qui correspond au désenchantement du monde extérieur (Max Weber).
La psyché se cherche de nouveaux lieux pour la projection de ses contenus essentiels : en atteste le succès de la fantasy dans les romans, les films et les jeux en ligne ! Reste à prouver dans quelle mesure Internet peut contenir ces lieux.